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Chapitre 7
Ingéniérie Moléculaire et Intelligence
Artificielle
L'intelligence artificielle a une influence certaine sur la philosophie,
la théorie générale de la technologie, l'informatique,
les sciences cognitives, la théorie de l'information, la
psychologie, la linguistique etc., par des effets conceptuels
qui s'insèrent dans la substance théorique de ces
domaines. Il est cependant évident que, pour la science
entière, les concepts ne sauraient être renouvelés
du seul point de vue de l'intelligence artificielle, sans une
permanente corrélation avec les domaines scientifiques
respectifs, bien évidemment, mais aussi avec la physique,
la biologie et les réalisations de pointe de la technologie.
Nous allons maintenant insister sur les possibilités d'une
technologie de pointe du futur, la nanotechnologie. Il
semble bien en effet que la microélectronique doive être
suivie d'une nanoélectronique selon deux modalités
possibles: soit celle des dispositifs et circuits quantiques,
soit celle de l'électronique moléculaire.
Comme son nom l'indique, la nanotechnologie est la technologie
du domaine nanométrique de même que la microtechnologie
(comme la microélectronique) est la technologie du domaine
micrométrique. Ce dernier comprend une gamme de dimensions
comprise entre 10 microns (micromètres) et 0,1 microns,
taille typique des circuits intégrés de silice et
de gallium-arsénic, dont l'élément composant-clé
est le transistor. Le domaine nanométrique de la technologie
comprend des objets variant entre 100 nm et 0,1 nm, autrement
dit de 0,1 microns à 1000 angströms, notés
Å. Afin de mieux imaginer l'échelle de ces dimensions,
il suffit de rappeler qu'un atome se situe en général
entre 1 et 10 Å, les macromolécules des cellules
biologiques entre 1 et 100 nm (soit entre 10 et 1000 Å),
les virus entre 10 et 100 nm, les bactéries autour d'un
micron. Les bactéries et généralement les
cellules sont micrométriques (bien qu'il existe des cellules
pouvant dépasser le domaine micrométrique si on
tient compte de la longueur des axones de certains neurones qui
peut atteindre un mètre), tandis que les organes des cellules,
les virus et les macromolécules sont nanométriques.
La nanotechnologie, inspirée de la biologie mais rendue
possible par le concours de la physique, de la chimie et de l'électronique,
s'oriente actuellement dans trois directions principales:
-
la nanomécanique visant la réalisation de "moteurs"
au niveau moléculaire,
-
la nanoélectronique visant la réalisation d'ordinateurs
moléculaires ou quantiques,
-
la nanomédecine visant la réalisation d'ensembles
moléculaires artificiels pouvant exercer une action sur
le corps humain dans des buts thérapeutiques, éventuellement
de manière nanoélectronique et des effets (nano)mécaniques
ou chimiques.
La technologie nanométrique renferme une série de
procédés, dont certains ont été empruntés
à la technologie actuelle, alors que d'autres sont totalement
nouveaux. Parmi ces derniers, on trouve:
-
le dépôt dans la vide de couches minces d'épaisseur
variant entre 100 et 10 nm,
-
l'épitaxie dans le fascicule moléculaire, procédé
permettant de déposer des couches d'une épaisseur
de quelques atomes seulement tant de matériaux inorganiques
(utilisés dans l'ingénierie des bandes d'énergies
pour réaliser des réseaux semi-conducteurs) que
de matériaux organiques (les épaisseurs déposées
vont de 20 à 2 nm),
-
l'implantation et la lithographie ioniques (avec résolution
de 0,1 micromètres (100 nm), et jusqu'à environ
1 nm),
-
les couches de Langmuir-Blodgett, soit monomoléculaires,
soit totalisant jusqu'à 10 couches monomoléculaires
superposées, contrôlées avec précision
(les molécules déposées sont organiques);
-
l'utilisation du microscope à effet tunnel avec résolution
de 1Å; il peut également être employé
comme station de travail pour des opérations relevant du
domaine nanométrique,
-
l'ingénierie moléculaire fondée en partie
sur les technologies précédemment exposées
mais surtout sur les propriétés d'auto-organisation
des ensembles moléculaires. Ce procédé est
utilisable, par exemple, dans l'électronique moléculaire
et aussi pour une ingénierie des protéines basée
sur l'établissement de cadres de séquences d'aminoacides
déterminant la configuration finale de la protéine
comme molécule composante d'un ensemble moléculaire
conçu par ingénierie moléculaire; en dernière
instance, celle-ci peut aussi aider à la réalisation
d'une ingénierie génétique, sans oublier
aussi la possibilité de synthèse chimique.
Ce qui vient d'être dit montre que la nanotechnologie est
déjà armée d'une série de procédés
et d'instruments promettant à l'homme une action au niveau
moléculaire, et même des manipulations atome par
atome pour construire, par exemple, des processeurs informationnels
d'une densité de composants extrêmement grande, autorisant
une grande vitesse de calcul.
Laissons de côté les dispositifs et les circuits
quantiques car ceux-ci n'ont pas d'équivalent dans la nature,
et réfléchissons à l'électronique
moléculaire qui présente, ne fût-ce que théoriquement
pour l'instant, plusieurs variantes:
-
celle de type F. L. Carter où les macromolécules
sont agencées de sorte qu'elles permettent la production
de fonctions logiques dans la molécule et entre les molécules,
sur la base de processus électroniques, en réalisant
de la sorte un modèle de circuits digitaux classiques;
-
celle de type K. E. Drexler qui propose également la
modélisation de fonctions logiques mais par le mouvement
mécanique de macromolécules agencées de manière
adéquate;
-
celle de type M. Conrad où la reconnaissance entre
protéines ayant des conformations complémentaires
est considérée comme équivalente à
un procédé de calcul complexe, qui pourrait même
avoir lieu naturellement dans les cellules vivantes;
-
celle de type S. R. Hameroff qui, sur la base de modèles
théoriques, et compte tenu aussi des travaux antérieurs
du physicien Herbert Fröhlich, prouve que le système
de microtubes du cytosquelette d'une cellule vivante a la structure
d'un automate cellulaire (comme les a décrit par John von
Neumann) capable d'assurer un traitement complexe de l'information.
La nanotechnologie qui, on le voit, pourrait aussi bien s'appeler
ingénierie moléculaire, est apte à provoquer
la création d'ordinateurs moléculaires dont on peut
se demander dans quelle mesure ils vont satisfaire à des
critères humains d'intelligence, c'est à dire dans
quelle mesure ils peuvent s'approcher de la réalisation
d'une intelligence artificielle vivante, voire d'une intelligence
naturelle comme celle de l'homme.
Par l'ingénierie moléculaire, l'homme pourra atteindre
le niveau où se constituent les molécules des organismes
vivants, comme s'il répétait à son propre
compte les procédés de la nature qui, en évoluant,
par ses tâtonnements, a abouti à l'apparition de
la vie. On arrivera bientôt à expérimenter
sur la nature de la vie, un domaine qui est encore seulement l'objet
de la pensée philosophique. C'est pourquoi les problèmes
de la nanotechnologie, de l'intelligence et de la vie, de la nature
de la matière ne peuvent plus être séparés
les uns des autres.
Mais dans quel modèle philosophique général
pouvons-nous prendre en compte de telles technologies? En science,
le point de vue prédominant est encore structural, formel,
fondé sur l'aspect syntactique, et il part de l'hypothèse
que la réalité entière peut être comprise
dans ce cadre cognitif. Conformément à ce point
de vue, l'intelligence est due à un grand nombre de composantes,
soient-elles naturelles ou artificielles, à la complexité
de leur organisation, ainsi qu'à leur interconnexion profondes.
Il est d'usage d'aller encore plus loin, et d'affirmer que non
seulement l'intelligence, mais aussi la conscience et surtout
les processus mentaux sont dus aux mêmes causes. L'intelligence
et l'esprit humain sont donc attribués à l'interconnexion
des neurones et aux phénomènes qui ont lieu dans
les dendrites les entourant. A notre point de vue, cette complexité
est certes nécessaire pour expliquer l'esprit humain, mais
elle est loin d'être suffisante.
L'existence de l'intelligence, ou plus exactement de quelque chose
dans le genre d'un ordinateur moléculaire, dans toute cellule
eucaryote, soit individuelle, soit faisant partie d'un organisme
complexe, comme le soutient avec beaucoup d'arguments justifiés
Stuart R. Hameroff et d'autres scientifiques avec lui, représente
sans doute un grand pas en avant, et le sera d'autant plus quand
ce fait sera pleinement confirmé. Le cytosquelette d'une
cellule contient, par la présence du système de
microtubes, un véritable système nerveux propre
à la cellule. Cela veut dire que chaque cellule renferme
un ordinateur moléculaire. Les microtubes sont des tuyaux
cylindriques de diamètre extérieur compris entre
25 et 30 nm et de diamètre intérieur d'environ 15
nm. Ils forment un réseau de filaments interconnectés,
leur longueur allant de 100 nm à des milliers de nanomètres
(soit quelques microns) et pouvant même atteindre des dimensions
de l'ordre du mètre dans les axones des neurones. Les briques
de ces tubes nanométriques sont les molécules d'une
protéine, la tubuline, en fait des dimères de 8
nm formés de deux molécules monomères de
4 nm chacune. Le dimère tubuline constitue une cellule
d'automate cellulaire dans le sens de von Neumann, le phénomène
le plus caractéristique pour un dimère du point
de vue physique est sa polarisation électrique permanente,
car les microtubes sont des électrets, c'est à dire
que leurs molécules gardent l'orientation donnée
par un champ électrique. Mais la polarisation d'un dimère
peut se modifier en fonction des événements électriques
du voisinage (ceux qui ont lieu dans des dimères voisins)
phénomène qui fait fonctionner l'ensemble tout entier
comme un automate cellulaire, chose attestée par le succès
de nombre de modèles. Il existe du reste dans les microtubes
une oscillation cohérente, comme l'a montré H. Fröhlich,
qui assure un mouvement d'horloge à cet "automate
cellulaire", véritable automate-ordinateur. La fréquence
de travail semble être de 109 Hz. Donc
ce système de microtubes a l'air jouer le rôle d'un
très puissant ordinateur au sein de la cellule. De pareils
ordinateurs, qu'on peut appeler "ordinateurs moléculaires",
doivent devoir exister aussi dans les neurones, auquel cas le
système nerveux de l'homme serait beaucoup plus complexe
qu'on ne pensait jusqu'à présent.
En science, la pensée strictement structurale mène
cependant à l'interprétation formulée par
Hameroff (en 1978) dans les termes suivants: "... cela implique
donc que, dans le cerveau, le niveau de base de la cognition se
trouve à l'intérieur des cellules nerveuses et que
les filaments des cytosquelettes sont les racines des phénomènes
conscients". Une telle affirmation peut contenir une grande
part de vérité mais, malgré cela, l'atomisme
n'a pas réussi et ne réussit toujours pas à
expliquer les phénomènes mentaux. Il manque vraisemblablement
quelque chose aux cytosquelettes pour aboutir à la nature
des processus mentaux. Hameroff a peut-être raison lorsqu'il
affirme que le cytosquelette et l'ordinateur moléculaire
pourraient représenter une clé pour résoudre
le problème du triangle cerveau-esprit-ordinateur, et que
la nanotechnologie pourrait faciliter la résolution des
problèmes qui se posent dans ce sens. Mais, là où
nous ne sommes plus d'accord avec Hameroff, c'est lorsqu'il extrapole
son hypothèse jusqu'à la conscience mentale, estimant
que "si la nanotechnologie et la biologie deviennent symbiotiques,
l'état de conscience ("soul") pourrait être
un produit ("commodity")". Que le cytosquelette
puisse être une partie d'un système nerveux des plantes,
comme du reste dès le début de ce siècle
Jaquadish Chunder Bose en a eu l'intuition en constatant, puis
en testant, une activité du type système nerveux
chez les plantes et aussi des animaux sans neurones, voilà
ce qui semble plausible. Qu'il existe une certaine forme de conscience
structurale, non mentale, voilà qui a déjà
été démontré par l'intelligence artificielle
actuelle. Mais le moment est venu de distinguer entre la pensée
d'un ordinateur électronique muni d'une intelligence artificielle
et la conscience du cerveau ou d'un organisme vivant.
Rappelons encore une fois que nous proposons de passer d'un modèle
structural du monde à un modèle structural-phénoménologique,
d'un modèle formel syntactique et sémantique, à
un modèle où le non formel joue lui aussi un rôle
important, et où le sémantique (du type conscience
mentale) se trouve dans la nature profonde de la matière
à laquelle ont accès les organismes vivants. Nous
portons un intérêt tout particulier aux conceptions
de type Conrad et Hameroff concernant les molécules du
fait qu'elles peuvent être reliées à un mode
de penser structural-phénoménologique afin de réaliser
le saut de pensée à conscience.
Des arguments exigeant de nouvelles recherches au-delà
du modèle de la science structurale peuvent être
trouvés, au cours de notre siècle, le philosophe
Ludwig Wittgenstein et du linguiste Noam Chomsky, au sujet du
langage naturel; de même dans les ouvrages de philosophie
de la science du physicien David Böhm, dans les paradoxes
de la science structurale relevés par le physicien John
Archibald Wheeler qui va jusqu'à envisager en dernière
instance une physique basée sur l'information; enfin, chez
Edward Fredkin pour qui l'information est l'ingrédient
primaire du monde. Deux autres prises de position, d'ailleurs
récentes, méritent aussi d'être mentionnées.
Roger Penrose, d'Oxford, affirmait dans une communication sur
"La physique et les mathématiques de la pensée"
(1988) qu'il nous faut admettre qu'il y a des objets physiques
qui ne se comportent pas comme des mécanismes. Penrose
déclare: "... disons simplement qu'un tel "non
mécanisme" physique pourrait avoir un comportement
totalement gouverné par des lois physiques précises
mais gouverné d'une manière qui ne peut être
dérivée d'aucune sorte d'algorithme". Observons,
à notre tour, que pour le moment rien ne saurait être
une plus éclatante représentation du formel que
l'algorithme. Prenant comme point de départ le théorème
de Gödel, Penrose montre que "l'argument (de Gödel)
permet en effet, par une contemplation et intuition conscientes,
d'aller au-delà des limites de n'importe quel système
mathématique formalisé ... c'est quelque chose qui
va au-delà du simple formalisme". L'analyse de ce
thème le conduit à l'idée que pour avoir
une image complète du monde, il est nécessaire d'aller
"au-delà de la théorie quantique standard"
afin d'arriver à s'expliquer pourquoi le cerveau n'est
pas un ordinateur digital. Penrose considère que, malgré
tout, la mécanique quantique devrait pouvoir jouer un certain
rôle dans la compréhension des phénomènes
mentaux. Nous avons avancé nous-mêmes des idées
comme celles-ci, il y a longtemps, en offrant même une image
s'appuyant sur le quantique pour la production des phénomènes
mentaux, mais qui va au-delà du quantique (voir par exemple,
Ortofizica, 1985). Penrose se fie aux actions physiques non algorithmiques
mais ne va pas jusqu'à inclure parmi celles-ci les actions
strictement non formelles, donc phénoménologiques
selon une conception orthophysique. Pourtant, en concordance avec
cette conception il affirme: "S'il est nécessaire
de découvrir quelque chose de non algorithmique dans les
lois de la physique, quelque chose que le cerveau puisse maîtriser,
alors me semble-t-il ce quelque chose devrait nous conduire au-delà
des lois physiques connues actuellement ... Probablement, aussi
curieux que cela paraisse, je crois qu'il y a des raisons pour
nous faire penser qu'une telle théorie, encore non découverte,
joue un rôle, en vérité fonctionnel, dans
les actions de notre pensée consciente ... Il me semble
que les questions philosophiques qu'elles posent commencent à
peine d'être explorées". Quant à nous,
la théorie de l'informatière avancée dans
le contexte de la vision orthophysique sur le monde, vient au-devant
des exigences si nettement formulées par Penrose et peut
justifier tout au moins la façon dont nous posions ces
problèmes au sein de notre modèle de l'anneau du
monde matériel.
La seconde prise de position récente mentionnée
plus haut est celle de Robert Rosen de Dahlousie University, Canada.
Dans sa communication sur "Les processus effectifs et les
lois naturelles" (1988), il se demande tout d'abord si la
question n'est pas d'introduire l'idée de logiciel en physique.
C'est très bien dit mais, à notre avis, le problème
de fond est d'introduire l'idée de l'information en physique.
A vrai dire, ce que Robert Rosen apporte de plus intéressant
concerne les phénomènes sémantiques. Critiquant
ceux qui ne tiennent compte que des systèmes formels syntactiques,
Rosen soutient que les phénomènes dont le fonctionnement
se réduit à des procédés syntactiques,
ainsi que l'entend en essence la thèse de Turing-Church,
ne peut servir de modèle universel. Rosen déclare
à ce propos: "Si c'était vrai, alors sans doute
des limites sévères nous sont tracées en
ce qui concerne le mode d'être de la physique. Le problème
n'est autre, ni plus ni moins, que de savoir si les lois de la
nature peuvent être formulées en termes purement
syntaxiques ou bien si elles disposent d'une composante sémantique
inhérente qui ne peut être formalisée de manière
finie". Analysant la thèse de Turing-Church, Rosen
est en désaccord avec son extension du domaine formel au
domaine physique. Dans notre optique, cette thèse peut
être étendue au domaine physique structural, mais
non au domaine structural-phénoménologique qui a
un contenu sémantique. Cependant, nous sommes évidemment
d'accord avec Rosen quand il affirme que "le fait d'analyser
la thèse (de Turing-Church) en termes matériels
signifie toucher aux aspects les plus profonds et les plus fondamentaux
de la science théorique".
Robert Rosen exprime aussi d'autres idées importantes par
rapport à notre propre point de vue. Le comportement de
certains systèmes, dit-il, "doit contenir une composante
sémantique irréductible, intimement reliée
à la complexité du système". Il n'y
a pas de doute que la sémantique est liée à
la complexité, comme le démontrent le cerveau, le
cytosquelette, et l'intelligence artificielle, mais ceci peut
se produire aussi dans le cadre des lois physiques structurales,
le sémantique pouvant être encodé dans le
syntactique. Mais la source du sémantique provient justement,
à notre avis, de ce qui en physique dépasse le structural.
D'ailleurs, Rosen, après avoir parlé des composantes
sémantiques non formalisables, répète: "Cela
signifierait ... que les Lois de la Nature ne peuvent être
entièrement exprimées en termes syntactiques".
Voici donc chez Rosen deux idées auxquelles nous sommes
arrivés dans le cadre d'une ontologie très étendue:
les lois de la nature doivent bien avoir des composantes sémantiques
intrinsèques et leur comportement sémantique peut
être aussi non formel.
Il est probable que la vision scientifique du monde va devoir
se modifier mais, comme très souvent dans l'histoire de
la science, c'est la pensée philosophique des scientifiques
qui est la première à entamer le changement. Entre
une philosophie de la science fondée strictement sur la
science actuelle et une philosophie de la science qui explore
l'avenir de la science, c'est bien sûr la seconde qu'il
faut préférer. En ce qui nous concerne, nous l'avons
d'ores et déjà préférée, mais
il nous semble qu'à présent la science elle-même,
par ses tâtonnements, force les portes de son propre avenir
dans une direction qui sympathise, en quelque sorte, avec le point
de vue orthophysique.
L'intelligence ne pourra être vraiment examinée que
dans le contexte d'une vision scientifique plus large, structurale-phénoménologique,
par contraste avec la vision structurale actuelle. Nous ne nous
attendons pas à ce que les lois de la nature contiennent
une intelligence propre bien que parmi elles, notamment dans les
plus fondamentales, puisse intervenir une phénoménologie
sémantique, non formelle dans la plus grande mesure. Ce
qui est sûr, c'est que ces lois ont engendré l'intelligence.
Resteront cependant à être examinées certaines
formes possibles d'intelligence et il est probable que l'ingénierie
moléculaire va nous offrir les instruments expérimentaux
requis pour élucider non seulement les problèmes
de l'intelligence et de l'esprit mais aussi de nombreux mystères
de la nature que nous avons été encore incapables
de dévoiler.
Dans l'avenir, la science se fera non seulement en interrogeant
la nature mais aussi en construisant comme la nature.
[Table des matières]
[Préface]
[Chapitre 1]
[Chapitre 2]
[Chapitre 3]
[Chapitre 4]
[Chapitre 5]
[Chapitre 6]
[Chapitre 7]
[Chapitre 8]
[Chapitre 9]
[Chapitre 10]
[Chapitre 11]
[Chapitre 12]
[Chapitre 13]
[Glossaire]
[Références bibliographiques]